1.   Un projet qui supprime de manière irréversible de riches terres agricoles irriguées.

·         Le projet de ZAC des Hauts Banquets, (phase 1 d’un projet global l06 ha), va entraîner l’artificialisation irréversible de 46 ha de terres agricoles. Or, à Cavaillon, 878 ha de SAU ont déjà disparu entre 1988 et 2010. Dans le Vaucluse,  la surface agricole utile a diminué 3 fois plus vite qu’au niveau national sur la période 1990-2018 (-18%), avec un rythme qui s’est fortement accéléré depuis 2010.

·         Stopper la consommation de terres agricoles est une urgence car il y a pénurie de foncier agricole dans la région ; nombre de jeunes de la région, formés à l'agriculture, ne trouvent pas de surfaces suffisantes pour s'installer à des prix abordables.

·         La Chambre d'agriculture du Vaucluse déplore cette consommation de terres fertiles et a demandé à la commune de Cavaillon de créer une ZAP (zone agricole protégée) pour compenser cette perte, ce que la commune n'a pas fait à ce jour.

·         Ces terres, situées dans le lit majeur de la Durance ont bénéficié des alluvions lors des submersions. La nappe phréatique se trouve à quelques mètres de la surface. Ce sont les zones les plus fertiles et humides de la commune. L'aptitude agronomique des sols ainsi sacrifiés est jugée très élevée, voire excellente, elle favorise la diversité culturale, comme indiqué dans l'étude préalable agricole au projet de janvier 2019.

·         La quasi-totalité de ces terres est irriguée. Le réseau d'irrigation gravitaire existant, fruit de siècles de travaux des générations antérieures, a prouvé son efficacité : il a permis une agriculture maraîchère très productive. Il réalimente aussi la nappe phréatique. Dans le contexte actuel du dérèglement climatique, la destruction du réseau d'irrigation gravitaire existant et le bétonnage de ces terrains seraient une atteinte aux biens communs et au patrimoine agricole ancestral.

2.   Un projet qui réduit les capacités d’autonomie alimentaire

·         La période de confinement lors de la crise de la Covid 19 a montré, l’importance vitale de retrouver une production alimentaire de proximité, notamment en périphérie directe des villes. Les territoires qui ont les circuits de proximité les plus développés ont montré qu’ils étaient les plus autonomes et les plus agiles pour assurer la sécurité alimentaire de leur population.

·         En cas d'une forte pandémie, avec un confinement total des transports, nous n'avons aucune capacité locale de faire face. C’est pourquoi le Plan Alimentaire Territorial du Luberon appelle à stopper la consommation de terres agricoles.

·         La perte de très bonnes terres agricoles fait perdre la possibilité de produire localement l’alimentation pour les populations et affaiblit l'économie agricole spécifique de notre région, capable d'alimenter la ville en produits frais notamment nécessaires pour la restauration collective. Le secteur de la ZAC, lieu de production historique largement connu, est donc une véritable réserve foncière capable de fournir la quasi-totalité de la population de Cavaillon en fruits et légumes. On sait que la pénurie alimentaire a souvent été le premier facteur de violence sociale. Il faut donc permettre l'accès à une alimentation suffisante et saine pour tous les citoyens.

3.   Un projet qui engendre de graves menaces sur l’environnement

·         Ce projet est aussi une atteinte à la biodiversité. Détruire les haies, les prés irrigués, les ruisseaux d'arrosage gravitaire, buser les canaux, c'est aussi détruire tous les représentants des espèces qui y vivent : vers de terre, libellules, grenouilles, campagnols, chauve-souris, buses variables... et tant d'autres ! C'est aussi empêcher la faune des auxiliaires des cultures (mammifères, oiseaux, arthropodes) de trouver gîte et couvert. 

·         Les inventaires naturalistes réalisés dans le cadre du dossier de demande d’autorisation environnementale ont mis en évidence la présence d’espèces animales protégées sur le site.

·         Les terres agricoles menacées participent à la lutte contre le changement climatique. Elles permettent de capter le carbone.

·         Les incidences du projet sur le paysage sont sous-estimées, alors qu’elles sont significatives. Le projet prévoit la construction de 145 000 m² de surface de plancher, deux très grands entrepôts, beaucoup de parkings et des routes bien larges prévues pour 600 camions par jour. Si la conjoncture reste défavorable, on obtiendra une friche industrielle. Le paysage ressemblera alors à une grande partie des zones existantes, dégradées, inorganisées et laissant apparaître de nombreux espaces inutilisés. L’image de la Ville en sera affectée, portant atteinte à son attractivité.

·         En raison de la forte perméabilité des alluvions et de la faible profondeur de la nappe, les eaux souterraines sont fortement vulnérables vis-à-vis des pollutions de surface. Les bassins de rétention prévus pour recueillir les eaux pluviales des surfaces rendues imperméables seront placés pour certains à 40 cm de la hauteur moyenne de la nappe phréatique. Or cette nappe durancienne fluctue beaucoup. Que se passera-t-il en cas de remontée de la nappe au-dessus de sa cote moyenne?

·         Le positionnement de la station d'épuration envisagée dans le projet, à proximité de la Durance, a poussé la DDASS à émettre un avis fortement réservé sur cette opération d'aménagement.

·         Artificialiser ces terres, c’est diminuer leur capacité d’absorption de l’eau et appauvrir le rechargement de la nappe phréatique et des aquifères du Bassin de la Durance. Or c’est une ressource vitale pour la Région, assurant l’alimentation en eau potable de millions d’habitants.

·         Cette zone recevra des entreprises logistiques importantes. Cela signifie encore plus de poids lourds, générant du bruit, de la pollution aux particules fines. Cela va augmenter de manière significative le trafic automobile ce qui contribuera à l’augmentation des nuisances sonores et au dérèglement climatique.

·         Le projet va générer près de 60000m3 de déblais et remblais liés aux aménagements collectifs.

4.   Un projet situé en zone inondable et qui renforce les risques d’inondation

·         Le site retenu demeure toujours soumis à un aléa inondation fort, malgré la création de la digue des Iscles de Milan. Au vu de la politique nationale de prévention des risques, il est considéré que le risque zéro n'existe pas, et qu'une digue, même en bon état, présente toujours un risque de défaillance (surverse, rupture...). Si cet ouvrage rompt, l'aléa inondation est souvent plus fort que ce qu'il serait en l'absence d'ouvrage si le site était inondé progressivement.

·         Cette digue donne donc un sentiment trompeur de sécurité et permet d’accroître la surface et le nombre des lieux exposés. C’est donc prendre une responsabilité particulièrement grave d’aménager et de construire dans cette zone alors qu’on en connaît les risques.

·          Les crues exceptionnelles de la Durance sont, de plus, susceptibles de se multiplier avec le réchauffement climatique. Celui-ci rend incertaine la pertinence de l’aléa de référence (6 500 m3). Les évènements de ces dernières années (récemment en décembre 2019 à Pertuis) ont montré que le phénomène des orages violents méditerranéens survient désormais à tout moment et peut se conjuguer à d’autres manifestations (notamment la fonte des neiges). Le volume des eaux peut atteindre alors des niveaux supérieurs à ceux constatés historiquement.

·         Le risque est encore aggravé par l’aménagement en chaîne du bassin de la Durance. Non seulement les barrages ne protègent pas contre les grandes inondations, mais ils peuvent les aggraver, la rupture d’un des 17 barrages existants pouvant générer une vague destructrice sur la totalité du cours.

·         Les conséquences de la conjugaison des crues de la Durance et du Calavon n’ont pas été envisagées dans ce dossier de Zac.

·         L’imperméabilisation des terres provoquée par la création de la ZAC a aussi des conséquences et aggrave l’inondation pour les riverains situés en aval et notamment ceux du cœur de ville de Cavaillon.

5.   Un projet contraire à ce qui est préconisé à tous les niveaux dans le contexte climatique et sanitaire actuel

·         Il est contraire aux préconisations du GIEC rapport du 08/08/2019 qui appelle à ne pas changer l'affectation des sols agricoles en conservant précieusement les terres fertiles pour assurer l'avenir.

·         Il est contraire à l'instruction du gouvernement du 29 juillet 2019 (confirmé le 27 juillet 2020) relative à l'engagement de l’État en faveur d'une gestion économe de l'espace qui commence par le rappel de l'annonce du Président de la République de la mise en place du principe de zéro artificialisation nette du territoire à court terme.

·         La loi proclame qu'il faut “éviter, réduire et compenser” la consommation d'espace pour tout nouveau projet. Dans ce projet de nouvelle ZAC « éviter » et « réduire » ont été oubliés. Dans son avis rendu le 8 avril 2019, le préfet du Vaucluse « considère que les mesures d'évitement et de réduction mises en place par le maître d'ouvrage n'ont pas permis d'annuler les impacts négatifs du projet sur l'économie agricole du territoire ».

·         Il contrevient aux circulaires de l’État du 24/1/1994 et du 24 /4/ 1996, qui interdisent les implantations humaines dans les zones les plus dangereuses.

·         Il est contraire à la préconisation du Schéma régional d'aménagement de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) de la région SUD-PACA qui appelle à une à la préservation du foncier agricole, en particulier les espaces agricoles, irrigués et/ou à forte valeur agronomique.

·         Il passe outre l’avis très réservé de la mission Régionale de l’Autorité Environnementale

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·         Il est contraire à une des priorités définies dans la Charte du Parc Naturel Régional du Luberon : celle de développer une agriculture paysanne, équitable et durable.

·         Il s’oppose au Plan alimentaire territorial du Luberon, qui appelle à stopper la consommation de terres agricoles au regard de la pénurie de foncier agricole sur le secteur;

6.   Les promesses bien aléatoires de ce projet ne justifient pas que soient pris tant de risques et causés tant de dégâts.

·         La pénurie de foncier commercialisable invoquée pour justifier la création de la ZAC n’est pas justifiée. Il n’y a pas d'étude économique de la demande qui permettrait d'évaluer les besoins fonciers réels sur la commune de Cavaillon et de justifier la stérilisation à tout jamais de terres arables.

·         Il n’est  pas évoqué la possibilité, par des opérations de densification, de requalification et de modernisation, d’attirer de nouvelles entreprises sur les zones d’activité existantes.

·         Il n’est pas démontré que la création d’emplois à forte valeur ajoutée sera de nature à absorber rapidement le chômage existant sur le territoire cavaillonnais, dont la population active est peu qualifiée. La création d’emplois projetée risque sans doute, à court terme, de répondre aux besoins d’autres bassins de vie où la population active est plus qualifiée, entraînant en ce sens une multiplication des déplacements.

·         La Chambre des Métiers (avis du 14 janvier 2019) souligne que le projet risque d’aggraver la désertification du cœur de ville de Cavaillon.

·         Le dossier présenté fait apparaître la réalisation de vastes entrepôts fortement consommateurs d'espace qui risquent de ne générer que peu d'emplois et peu de richesses. La création des 1600 emplois semble un effet d’annonce et repose essentiellement sur de la logistique innovante ou logistique fine, alors que de nombreuses zones (dont certaines de grandes dimensions) y sont consacrées à proximité (Avignon, Grans, Salon, Arles, St Martin de Crau, Miramas).

·         Aujourd’hui nul ne sait quelles entreprises s’y installeront, à part un entrepôt logistique qui n’a rien de très « Natura’Lub ». Emplois dans la logistique souvent précaires, non valorisants, à la merci de la robotisation. Comme la grande distribution en son temps, la vente en ligne (donc la logistique), détruit plus d’emplois qu’elle n’en crée.

·         Il y a grand risque à aménager et réaliser des équipements publics coûteux (12 millions d’euros au minimum) alors que la demande, qui dépend de la conjoncture économique, risque de ne pas se concrétiser. 

·         Déjà plus de 10 millions engagés pour l’achat de terres qui étaient agricoles.

·         La logistique présentée comme la modernité, consiste à acheter en ligne des marchandises venant d'on ne sait où, confectionnées par des ouvriers qui n'ont parfois aucun droit social, dans des pays sans droits de l'environnement, sous des régimes politiques qui tolèrent le travail des enfants à partir de 4 ans et/ou l'esclavage, marchandises convoyées sur de longues distances, stockées dans d'immenses hangars, où les employés sont soumis au rythme de robots. Est-ce cela le progrès ?

 

7.   D’autant que d’autres alternatives étaient possibles.

·          La densification et une revalorisation des zones d’activité existantes sur la Commune de CAVAILLON pourrait provoquer la dynamique économique et sociale recherchée (création d’emplois et d’entreprises, innovation). Il faudrait alors rénover/remplacer des bâtiments énergivores par des alternatives écologiques et plus adaptées aux métiers d’aujourd’hui.  

·         13 ha de foncier sont prêts à accueillir des entreprises sur la CA LMV pour les porter vers l’avenir au lieu de les laisser vieillir sans entretien, sans autres perspectives que de voir migrer les entreprises qui le peuvent financièrement vers des zones neuves, conquises aux dépens des espaces agricoles ou naturels.

·          Dans cette zone inondable des Hauts Banquets, l'activité humaine la plus appropriée est l'agriculture en systèmes agroécologiques (maintien de la perméabilité des sols, risques de sinistres minimes comparés à une zone d'activités, conciliation de l'activité humaine et de la riche biodiversité de ces milieux).

·         Certaines communes acquièrent des terres agricoles pour les louer aux jeunes agriculteurs : voilà qui serait bien d'utilité publique dans notre Vaucluse où la pression foncière devient insupportable pour les gens modestes.

·         Vu le contexte où toute pandémie pourrait provoquer une grave pénurie alimentaire, il est temps d’engager une relocalisation agroécologique de l'alimentation. Cette zone pourrait faire l’objet d’un projet alternatif basé sur des modes de production respectueux de l’environnement et favorisant une mixité entre une agriculture biologique et des activités tertiaires innovantes. Ceci permettrait d'engager une transition vers une économie plus responsable nécessaire à l'avenir de notre société.